L'INTERDÉPENDANCE
Interprétation de la loi d'interdépendance
par P.A. PAYUTTO
Traduction française de Jeanne Schut
Le
principe de « l'origine conditionnée des phénomènes »
a été interprété de plusieurs façons que nous pouvons
globalement formuler ainsi :
1. En tant que
démonstration de l'évolution de la vie ou du monde, basée sur
une définition littérale d'expressions comme lokasamudaya
(l'apparition du monde).
2.En tant que démonstration de
l'apparition et de la cessation de la vie individuelle ou de la
souffrance individuelle.
Cette seconde interprétation peut
encore se subdiviser en deux catégories :
2.1. Démonstration du processus sur une très longue période de temps, d'une existence à l'autre. Il s'agit là de l'interprétation la plus littérale qui est aussi celle que l'on retrouve le plus souvent dans les commentaires des Ecritures. Elle est expliquée jusque dans ses moindres détails, au point que le lecteur non averti risque de se perdre dans la pléthore de termes techniques employés.
2.2.
Démonstration du processus dans ses manifestations au quotidien.
Bien que liée à 2.1, cette interprétation donne une définition
plus profonde et plus concrète des termes. Elle met l'accent sur
l'instant présent, lequel est considéré comme le véritable
objectif de cet enseignement. Cette interprétation est confirmée
par les enseignements donnés dans de nombreux sutta ainsi que
par certains passages de l'Abhidhamma Pitaka qui décrivent
tout le processus de l'interdépendance comme se déroulant dans
l'instant même, à la vitesse de l'éclair.
Dans
la première interprétation mentionnée ci-dessus, le principe
d'interdépendance est présenté comme une théorie sur l'origine
du monde dont l'ignorance (avijjā)
serait la cause première puis on retrace l'évolution à travers
chacun des douze maillons de la chaîne. Ce type d'interprétation
rend le bouddhisme très semblable à d'autres religions et
philosophies qui ont pour postulat un principe créateur ou Dieu. Les
interprétations ne différeraient que dans la mesure où ces
religions et philosophies décrivent la naissance et l'existence du
monde comme l'œuvre d'une force surnaturelle, tandis que le
bouddhisme - selon cette interprétation - expliquerait les
choses comme une simple forme d'évolution procédant des lois
naturelles de cause à effet.
Cependant cette interprétation
contredit tout à fait les enseignements du Bouddha. Tout
enseignement ou école de pensée qui décrit le monde comme le
produit d'une « cause première » est contraire au
principe d'interdépendance. En effet celui-ci dit clairement que
tout est lié et en perpétuelle co-création sous l'influence des
causes et des conditions. Toute cause première, qu'il s'agisse
d'un dieu créateur ou autre, est donc impossible. On ne peut
interpréter la loi d'interdépendance comme la description de
l'évolution de la vie ou du monde que si l'on présente une
image de l'univers fonctionnant selon les processus naturels de
croissance et de dégénérescence, et se déployant sans cesse sous
l'influence de causes et d'effets.
Pour évaluer la
plausibilité de ces interprétations, nous devons garder à l'esprit
l'objectif du Bouddha quand il a enseigné la loi
d'inter-dépendance. En fait, tous ses enseignements avaient pour
unique but de proposer des moyens de faire face aux problèmes de la
vie de manière très concrète. Il n'a jamais encouragé les
spéculations, les débats ou l'analyse de problèmes
métaphysiques. C'est pourquoi toute authentification de
l'interprétation d'un enseignement bouddhiste doit inclure une
évaluation en termes de principes éthiques.
Or définir la
loi d'interdépendance comme un processus d'évolution sans
commencement ni fin, même si cela peut sembler correct, ne présente
que peu de valeur éthique. Voici ce que l'on pourrait en retirer
sur ce plan :
1) Une
vue plus vaste du monde : en effet, celui-ci procède du flux de
causes et d'effets et il est lié aux conditions de processus
naturels. Il n'y a pas de créateur et le monde n'est pas non
plus le résultat d'une série d'accidents dus au hasard. L'Homme
ne peut réaliser ses buts en se contentant de faire des souhaits ou
de supplier les dieux ou la chance ; il y parvient en s'appuyant
sur ses propres efforts, lesquels se basent sur une compréhension
des causes et des conditions qui l'entourent.
2)
On ne peut créer les causes justes pour
obtenir ce que l'on souhaite que si l'on a bien compris ces
causes et la façon dont elles sont liées à leurs résultats
respectifs. Ceci nécessite une compréhension profonde (pañña)
capable de discerner ces complexités. L'action et la relation à
la vie doivent donc être guidées par la sagesse.
3)
Comprendre que le processus naturel est
soumis au continuum des causes et des effets peut permettre de
diminuer l'illusion du soi qui est à l'origine de l'attachement
et de l'identification aux choses. Une telle perspective rend
possible une relation plus saine et plus libre avec les choses telles
qu'elles sont véritablement.
Interpréter le principe
d'interdépendance comme une théorie de l'évolution du monde
reste tout de même assez superficiel. Bien qu'en accord avec les
enseignements du Bouddha, il manque à cette interprétation une
analyse profonde et détaillée, d'instant en instant, des
composants physiques et mentaux. Elle n'est ni assez puissante ni
assez claire pour véritablement engendrer les trois résultats
mentionnés plus haut, en particulier le troisième. Pour approfondir
davantage la vérité, il faut examiner plus en détail comment se
déroulent les événements naturels sur un plan personnel et
percevoir clairement la réalité de ce processus quand il se produit
dans notre vie, ne serait-ce que très brièvement. Une conscience
aussi claire donnera certainement une meilleure occasion, aux trois
avantages mentionnés plus haut, de se manifester. D'ailleurs, il
est à noter que l'interprétation sur un plan plus immédiat
n'empêche pas que le processus soit également interprété sur le
long terme.
Toute explication du principe d'interdépendance
en tant que théorie d'évolution du monde, au sens premier comme
au sens plus subtil, manquera de profondeur. La seconde
interprétation qui concerne la vie personnelle et en particulier le
processus de perpétuation de la souffrance individuelle, est
beaucoup plus profonde.
Parmi les descriptions du cycle des
éléments interdépendants en tant que processus personnel,
l'interprétation (présentée en 2.1) qui recouvre plusieurs
existences est celle qui est la plus acceptée et développée dans
les Commentaires. On l'y traite en détail, on l'élabore, on la
systématise et on l'illustre. Malheureusement cette
systématisation est assez rigide et rend les choses assez obscures
pour les néophytes. Nous lui consacrerons ici tout un chapitre,
lequel sera suivi de l'interprétation - partiellement reliée -
qui donne l'interdépendance pour un processus survenant à la
vitesse de la pensée (version 2.2).
La
signification essentielle
En
essence, le principe d'interdépendance est une description du
processus d'apparition et de cessation de la souffrance. Le mot
« souffrance » (dukkha)
est un terme très important dans le bouddhisme. Il apparaît dans
tous les enseignements fondamentaux comme les Trois Caractéristiques
(tilakkhana)
et les Quatre Nobles Vérités (ariyasacca).
Pour mieux comprendre le principe d'inter-dépendance, il est
essentiel de commencer par une définition du mot dukkha.
Dans l'enseignement du Bouddha, ce terme a un sens beaucoup
plus large que l'équivalent français « souffrance ».
Il faut donc écarter une interprétation étroite et considérer le
mot à la lumière de la vaste portée des paroles du Bouddha. Dans
ses discours apparaissent trois types de souffrance. Nous les
énumérons ci-dessous, ainsi que les explications données dans les
Commentaires :
1. Dukkha-dukkhatā :
C'est la souffrance en tant que sensation ou sentiment. Cela inclut à
la fois la souffrance physique comme les maux ou la douleur, et la
souffrance mentale comme la tristesse, par exemple. Ce sens est donc
proche de celui que l'on donne généralement au mot français
« souffrance ». Il correspond au terme pāli
dukkhavedanā :
sentiment ou sensation qui apparaît d'ordinaire quand on vit
quelque chose de désagréable.
2. Viparināma-dukkhatā :
C'est la souffrance liée à l'impermanence, la souffrance
inhérente au fait que le bonheur ne dure pas. Elle est causée par
les changements qui surviennent dans notre bonheur ou qui y mettent
fin. Imaginez, par exemple, que vous travailliez dehors au soleil
sans que la chaleur vous dérange car vous y êtes habitué, puis
vous entrez dans une pièce où l'air est conditionné ; la
fraîcheur vous sera agréable mais cette sensation se transformera
en réaction désagréable quand vous retournerez au soleil car,
cette fois, la chaleur vous paraîtra insupportable. La sensation de
chaleur qui était neutre au départ devient inconfortable à cause
de l'agréable fraîcheur de l'air conditionné. Le côté
agréable de l'un donne un aspect désagréable à l'autre. C'est
presque comme si la souffrance était toujours présente à l'état
latent et ne se révélait qu'avec la disparition du plaisir. Plus
la sensation agréable est intense, plus la souffrance qui s'ensuit
sera intense ; la souffrance semble se propager proportionnellement à
l'intensité de la sensation agréable. Si la sensation agréable
n'était pas apparue, la souffrance qui y est liée ne serait pas
apparue non plus. Si la sensation agréable est accompagnée d'une
conscience de sa nature éphémère, elle est assombrie par la peur,
l'inquiétude et l'incertitude. Quand la sensation agréable
finit par disparaître, elle est suivie de nostalgie : « J'étais
si heureux avant, maintenant c'est fini ».
3. Sankhāra-dukkhatā :
C'est la souffrance inhérente à tous les sankhāra,
à tout ce qui naît d'une cause et, en particulier, aux cinq
khandha.
Ceci fait référence au fait que tout ce qui est conditionné est
sujet aux forces contraires de l'apparition et de la disparition ;
rien n'est parfait en soi ; les choses n'existent qu'en
tant qu'éléments du continuum de causes et d'effets. C'est
pourquoi elles risquent de causer de la souffrance (un sentiment ou
une sensation de souffrance ou dukkha-dukkhatā)
à chaque fois qu'il y aura désir et attachement irrépressibles
du fait de l'ignorance (avijjā-tanhā-upādāna).
Le type de souffrance le plus grave est le troisième. Il
décrit la nature inhérente à toutes les conditions, qu'elles
soient physiques ou mentales. Sankhāra-dukkhatā,
bien que lié à des circonstances naturelles, prend une
signification psychologique quand on prend conscience que les
phénomènes conditionnés ne peuvent apporter aucune satisfaction
parfaite et que, de ce fait, ils causeront de la souffrance à
quiconque tentera de s'en saisir.
Le principe de l'origine
conditionnée montre comment tous les phénomènes sont
interdépendants et liés entre eux sous forme d'un continuum. En
tant que continuum, on peut les analyser à partir de différents
points de vue.
D'une part, tout est lié et
interdépendant ; tout existe en relation avec autre chose ;
tout phénomène est causé par des facteurs déterminants ;
rien ne dure, pas même un instant ; rien n'a d'existence
intrinsèque ; rien n'a de cause première ou genèse.
En
d'autres termes, le fait que tout apparaisse sous diverses formes
d'évolution et de déclin, indique que la véritable nature des
choses est d'être un continuum ou un processus. En tant que
continuum, elles sont nécessairement issues de nombreuses causes. La
forme d'un continuum apparaît parce que les différentes causes
sont liées. Le continuum évolue et change de forme parce que les
différents facteurs qui le composent ne peuvent pas durer, pas même
un instant. Les choses ne peuvent pas durer le moindre instant parce
qu'elles n'ont pas d'existence intrinsèque. Comme elles n'ont
pas d'existence intrinsèque, elles dépendent entièrement de
leurs causes. Puisque les causes sont liées entre elles et
interdépendantes, elles maintiennent la forme d'un continuum et le
fait qu'elles soient ainsi liées et interdépendantes indique
qu'elles n'ont pas de cause première.
Ceci peut aussi
être exprimé sur un mode négatif : si les choses avaient la
moindre existence intrinsèque, elles posséderaient une certaine
stabilité ; si elles pouvaient rester stables, ne serait-ce
qu'un instant, elles ne pourraient pas être véritablement reliées
entre elles ; si elles n'étaient pas reliées entre elles,
elles ne pourraient pas former un continuum ; s'il n'y avait
pas de continuum de causes et d'effets, la nature ne pourrait pas
fonctionner ; et s'il y avait un soi intrinsèque réel à
l'intérieur de ce continuum, il ne pourrait pas y avoir de
véritable processus d'enchaînement interdépendant de causes et
d'effets. En conséquence, le continuum de causes et d'effets qui
permet aux phénomènes d'exister comme ils le font ne peut
fonctionner que parce que ces phénomènes sont impermanents,
éphémères, apparaissant et disparaissant sans arrêt, et qu'ils
ne sont dotés d'aucune existence propre.
Le fait d'être
impermanent, éphémère, apparaissant et disparaissant sans arrêt
s'appelle aniccatā.
Le fait d'être soumis à la naissance et à la dissolution, d'être
inévitablement sujet à la tension et au conflit et d'être
intrinsèquement imparfait s'appelle dukkhatā.
Le fait que tout véritable soi soit vacuité s'appelle anattatā.
Le principe de l'origine conditionnée des phénomènes illustre la
présence de ces trois attributs en tout, et montre comment
l'interaction et l'interdépendance de toute chose produit les
différents événements de la nature.
Le fonctionnement du
principe d'interdépendance s'applique à tous les domaines
physiques et mentaux, et s'exprime à travers un certain nombre de
lois naturelles :
Dhammaniyāma :
la loi naturelle des causes et des effets.
Utuniyāma :
la loi naturelle qui s'applique aux objets physiques (lois
physiques).
Bījaniyāma :
la loi naturelle qui s'applique aux êtres vivants et à l'hérédité
(lois biologiques).
Cittaniyāma :
la loi naturelle qui gouverne le fonctionnement du mental (lois
psychologiques ou psychiques).
Kammaniyāma :
la loi du kamma,
particulièrement importante parce qu'elle détermine le bien-être
des humains et qu'elle est directement reliée au comportement
dans une perspective éthique.
Il est intéressant de
remarquer que le kamma, comme toutes les autres relations de cause à
effet, ne peut opérer que parce que les choses sont impermanentes
(anicca)
et sans existence intrinsèque (anattā).
Si les choses étaient permanentes et dotées d'une existence
propre, aucune des lois naturelles, pas même celle du kamma, ne
pourrait entrer en action. De plus, ces lois confirment la vérité
selon laquelle il n'y a pas de cause première ou genèse.
Les
choses n'ont pas d'existence intrinsèque parce qu'elles
naissent d'une cause et sont liées les unes aux autres. En voici
une simple illustration : l'objet que nous appelons un
« lit » se compose de nombreux éléments qui, assemblés,
lui donnent l'apparence que nous lui connaissons. Il n'existe pas
de « lit » en dehors de ces composants. Si tous les
composants sont séparés, il ne reste aucun « lit ». Il
ne reste que le concept de lit. En réalité, ce concept lui-même
n'existe pas de manière indépendante : il est nécessairement
lié à d'autres concepts comme dormir, surface plane, base, espace
vide, etc.
Les concepts apparaissent dans l'esprit du fait
de l'association de relations. Une fois qu'un ensemble de
relations a formé un concept dans l'esprit, les gens ont tendance
à s'y accrocher sous l'emprise du désir (tanhā)
et de l'attachement (upādāna),
comme s'il avait une existence absolue. Cet attachement isole le
concept de sa relation avec le reste et entache la perception de
notions de « moi » et de « mien » qui
conduisent à l'identification et empêchent toute compréhension
véritable.
Les choses n'ont pas de cause première unique.
Si l'on remonte la chaîne de causalité à l'infini, on ne
trouvera de cause originelle à rien mais les êtres humains ont
tendance à chercher un commencement aux choses. Cette façon de
penser est en contradiction avec le fonctionnement de la nature et
engendre une façon de voir qui va à l'encontre de la vérité.
C'est une façon de se tromper soi-même due à l'habitude qu'ont
les humains d'arrêter toute recherche des causes dès que la
première apparaît. Ainsi la façon habituelle de comprendre la
relation de cause à effet impliquant l'existence d'une cause
première est inexacte et contraire aux lois de la nature. C'est
pourquoi il est nécessaire de rechercher plus loin en arrière et de
se poser la question : « Quelle est la cause de cette
soi-disant 'cause originelle' ? » et continuer ainsi à
remonter la chaîne des causes - mais on n'en trouverait pas.
Mieux vaudrait poser la question ainsi : « Pourquoi les
choses devraient-elles avoir une cause première ? »
Une
autre forme de raisonnement, qui contredit la nature et qui est liée
à l'idée d'une cause première, consiste à croire qu'au
début il n'y avait rien. Cette idée vient de l'attachement à
la notion de soi (attā),
laquelle provient elle-même de l'attachement aux concepts. A
partir de là, on déduit que rien n'existait avant mais qu'ensuite
ce rien s'est étendu. Ce type de raisonnement erroné est dû à
la tendance humaine à se saisir d'idées et à ignorer la
véritable nature des concepts, ce qui revient à dire : ne pas
connaître les choses telles qu'elles sont. C'est ainsi que l'on
en vient à rechercher quelque chose d'éternel, une cause
première, un mouvement originel, un créateur de toutes choses ...
Mais cela donne encore naissance à de nombreuses contradictions
comme, par exemple : « Comment ce qui est éternel peut-il
créer quelque chose de non éternel?» En réalité,
dans le flot mouvant des causes et des effets, il n'est pas
nécessaire de prendre position pour ou contre l'existence de quoi
que ce soit de statique, ni « au commencement » ni en cet
instant - sauf dans le monde spécifique des concepts parlés. Nous
aurions plutôt intérêt à reconsidérer la question : « Pourquoi
l'existence doit-elle être précédée de la non-existence ? »
La croyance généralisée selon laquelle tout aurait un
créateur est encore une de ces idées qui vont à l'encontre de la
réalité. Elle est le fruit d'une déduction basée sur
l'observation de la capacité de l'Homme à créer, à fabriquer
des objets de toutes sortes, comme les arts, etc. On en déduit que,
en conséquence, tout au monde doit avoir un créateur. Dans ce cas,
nous commettons l'erreur d'isoler le concept de « création »
ou de « construction » du continuum normal des causes et
des effets, de sorte que notre prémisse fondamentale est erronée.
En réalité, le fait de créer n'est qu'un maillon de la chaîne
d'interdépendance. Le fait même de pouvoir créer est lié à
notre capacité à devenir des facteurs dans le processus de
relations qui aboutira au résultat désiré. Nous ne différons des
facteurs purement physiques concernés que dans la mesure où, dans
notre cas, certains éléments mentaux - dont l'intention -
sont également présents. Néanmoins ces facteurs font partie d'un
ensemble et sont soumis au même processus de cause à effet. Par
exemple, si nous voulons construire un gratte-ciel, il faut que nous
fassions partie du flot des facteurs déterminants et que nous en
manipulions d'autres tout au long du processus d'accomplissement.
Si la simple pensée de créer suffisait à faire surgir les choses
indépendamment d'un processus de cause à effet, nous pourrions
construire des gratte-ciel n'importe où, simplement en y pensant -
ce qui est impossible. Le mot « création » ne signifie
donc rien de plus que la description d'une partie d'un processus.
Enfin, lorsque les choses se déroulent sans heurts, selon
l'enchaînement des causes et des effets, la question d'un
créateur ne se pose même plus.
Quoi qu'il en soit,
rechercher des preuves de l'existence d'une cause première, d'un
dieu créateur ou autre, ne présente que peu d'intérêt dans
l'optique bouddhiste car ce n'est pas considéré comme essentiel
pour pouvoir mener une vie pleine de sens. Même si réfléchir à ce
propos peut apporter une vue plus vaste du monde, comme nous l'avons
dit plus haut, nous pouvons nous en dispenser. En effet, la valeur de
l'enseignement de l'interdépendance en termes de plénitude de
vie offre déjà tous les avantages désirés. Nous devrions donc
diriger davantage notre attention dans cette direction.
(source : https://www.dhammadelaforet.org/sommaire/payutto/interpretation.html )